Le collectif « Balance ton bar » actif depuis plusieurs mois publie des témoignages de victimes d’agressions sexistes ou sexuelles, de personnes droguées à leur insu dans des bars ou discothèques d’Amiens.

Ces témoignages anonymes, rapides et peu étayés par des preuves, font état d’un combat certes juste mais aux méthodes discutables. Plusieurs associations qui soutenaient le projet ont donc décidé de se désolidariser du collectif.

Le collectif ‘Balance ton bar’ publie régulièrement des témoignages de victimes en nommant les bars concernés, dernier en date, le Network. Ces témoignages ont parfois des répercussions immédiates.

« Balance ton bar », soutenu par des associations et bars amiénois fait l’objet de plusieurs polémiques au sein de ses partenaires. Certains d’entre eux se désolidarisent depuis quelques semaines face au « manque de déconstruction » de ses membres et par « la minorité de personnes concernées au sein du collectif« .

Les associations féministes les Bavardes mais aussi Le Planning familial de la Somme et le collectif Collages Féminicides ont pris leurs distances avec le projet même si elles en approuvent le principe et continueront à le faire dans leur propre réseau.

Une instrumentalisation de la parole des victimes au détriment des bars ?

« Bien que favorables à la démarche et sans douter un instant de l’authenticité des témoignages, nous ne pouvons plus souscrire à l’organisation du collectif telle qu’établie aujourd’hui » , détaille Les Bavardes suite à leur décision. « En soutien et à la suite du Planning familial 80 et du Collectif Féminicides Amiens nous attirons l’attention sur la minorité de personnes concernées actives au sein du collectif, ainsi que sur le manque de déconstruction de certain-es membres. »

Avant de conclure: « Nous continuerons à dénoncer les bars problématiques dans nos propres réseaux et à collaborer avec des bars bienveillants pour nos événements. »

Du côté de la Fédération des Associations Etudiantes Picardes qui soutient également le collectif « Balance ton bar »: « On ne se désolidarisera pas, en tout cas pour le moment » fait savoir son président, Paul Lafay. « Même si effectivement leurs méthodes sont discutables et certains témoignages douteux, la FAEP ne se désolidarisera pas du projet car la cause reste louable: des jeunes sont victimes de tout un tas de choses et de manière générale les institutions ne nous prennent pas au sérieux lorsque l’on en parle, voire nous disent que l’on ment »

En interne les discussions ont été houleuses au sein de la fédération et le contrôle des témoignages échappe aux associations partenaires; un point épineux: « je tiens à préciser que nous ne prenons pas part activement aux actions du collectif, nous ne discutons pas plus que ça avec eux et ne participons pas à la publication des témoignages. »

Des accusations aux répercussions immédiates 

Début juin, Le Rétroviseur réagissait après de nouvelles accusations qui le visaient sur le compte du collectif « Balance ton bar ». Une procédure de licenciement avait été engagée contre un employé soupçonné d’agressions sexistes envers des clients. Mis à pied depuis le 13 juin, il réfutait en bloc les faits mais en l’absence de réels cadres judiciaires difficile d’affirmer que la justice et la parole des victimes peuvent être honorées.

Cette fois, c’est au tour du Network de faire l’objet d’une publication du collectif qui évoque le cas de deux personnes fréquentant le bar et qui auraient été droguées au GHB, la publication précise que les deux personnes auraient eu le résultat de leur analyse le lendemain matin, soit moins de 15 heures après les faits potentiels; un délai qui interroge. Le GHB est détectable dans le sang par certains laboratoires spécialisés, difficilement visible, il ne reste que quelques heures dans l’urine et l’organisme.

Contacté, le collectif n’a pour l’heure pas donné suite à nos sollicitations. En avril dernier, plusieurs responsables de bars d’Amiens avaient proposé de travailler directement avec « Balance ton bar »,  pointant les limites de l’anonymat. Un flou qui entretient une certaine suspicion quant à l’utilisation de ces témoignages de victimes qui existent pourtant bel et bien.