Une foule impressionnante a manifesté contre la réforme des retraites et le 49.3, ce jeudi 23 mars jusqu’à la zone industrielle d’Amiens Nord. Entre 10 000 et 20 000 manifestants selon les moments, se sont relayés sur un trajet de plus de 14 kilomètres aller-retour dans une ambiance festive et émouvante. Une mobilisation amiénoise exceptionnelle dans un contexte de crise politique et sociale qui tranche avec celle du reste de la France, marquée par les violences policières.

C’est dans sa ville natale et ce cortège massif et déterminé qu’Emmanuel Macron a perdu définitivement la bataille de l’image et de l’opinion. L’intersyndicale annonce une nouvelle journée de mobilisation le 28 mars.

La manifestation amiénoise a réuni plus de 20 000 manifestants selon l’intersyndicale. Une mobilisation exceptionnelle et un parcours atypique vers la Zone industrielle Nord, ce jeudi 23 mars, pendant plus de 4 heures.

Amiens était mobilisée comme jamais ce jeudi. Pendant plus de 4h00, la mobilisation amiénoise s’est illustrée par son ambiance, sa diversité et sa détermination. Le cortège qui a emprunté un parcours atypique vers les quartiers Nord, a entrainé des milliers de manifestants au fil de sa trajectoire. Un parcours où les forces de l’ordre étaient quasi absentes, une fois la Citadelle franchie.

Restés en retrait sur un pont au bout d’une ligne de chemin de fer, les CRS ont attendu le repli de la majorité des manifestants pour déloger vers 22h00, les opposants qui bloquaient encore l’accès au nord de l’agglomération, dans la Zone industrielle.


Le constat est sans appel; aucune tension n’est à déplorer hors mis le gazage d’un groupe d’opposants au terme de la manifestation, à l’extrémité de la zone industrielle. Les gendarmes ont tenté de gazer avec le vent de biais les manifestants, qui ont répliqué en caillassant la voiture qui a du s’enfuir le coffre ouvert; la scène a clôturé une mobilisation exceptionnelle.

La jeunesse mobilisée

Le cortège qui est parti aux alentours de 14h de la MACU, s’est dirigé vers le Nord via le pôle universitaire de La Citadelle. Caractérisé pour cette nouvelle journée de mobilisation par sa diversité, le cortège s’est très vite structuré par groupes politiques ou syndicaux pour indiquer le sens de la marche; rendant difficile une estimation du nombre de manifestants, qui s’amassent d’habitude sur la place de la Maison de la Culture plusieurs dizaines de minutes.

Le cortège est passé dans les quartiers Nord et devant la Citadelle s’étoffant au fur et à mesure de sa trajectoire.

Mais parmi les manifestants, des jeunes, des amiénois-es et des gens d’ailleurs, des moins jeunes, des travailleurs, des start-upeurs, des patrons de bar, des ouvriers, des chômeurs, des anarchistes, des communistes, des socialistes, des CFDTistes, des CGTistes, des antifascistes et des fascistes, des gauchos d’un soir et même des droitards; la foule amiénoise marchait, ce jeudi, contre un projet de société.

Dès 14h30, le cortège de « 10 000 manifestants au minimum » selon certains représentants de la CGT, s’est étoffé au fil des quartiers traversés. D’abord à la Citadelle, où plusieurs centaines d’étudiants attendaient, puis dans les quartiers Nord pour franchir le cap des 20 000 manifestants selon l’intersyndicale.

La détermination et l’émotion des corps fatigués par la mobilisation

Le cortège a rejoint d’autres manifestants qui pour certains bloquaient les ronds-points d’accès à la zone industrielle depuis 4h00 du matin.


Traversant champs et usines, la foule déterminée, animée, émue d’être aussi soudée, est arrivée au cœur de la Zone industrielle nord après plus de deux heures de marche.

Le député de la Somme, François Ruffin était présent sur les barrages. Rejoint par la foule, la pression lâche et l’émotion de voir une telle mobilisation est la plus forte.

Après 17h00, les plus courageux ont franchi les barrages et sont venus en renfort au dernier point de blocage de la Zone industrielle Nord, épuisés mais convaincus les manifestants se sont dispersés progressivement et sont repartis par petites grappes vers le centre-ville. Un parcours de plus de 14 kilomètres, comme un symbole contre la politique d’Emmanuel Macron. Les amiénois ont gagné une bataille, celle de l’image.

Un exécutif fragilisé

Alors qu’ailleurs, la mobilisation a été fortement réprimée et marquée par des violences policières; Amiens reste d’autant plus un symbole de résistance à la politique du gouvernement d’Elisabeth Borne, que le cortège déterminé mais calme a su démontrer sa force tranquille.

Alors que pour les députés d’opposition ce gouvernement « est d’ores et déjà mort » , comme le déclarait la cheffe de file des Insoumis, Mathilde Panot, François Ruffin appelait lui à « la démission » d’Élisabeth Borne. La Première ministre « doit partir » ou « le président doit la démissionner », avait également estimé la présidente du groupe RN Marine Le Pen, suite au rejet des motions de censure provoquées par l’usage du 49.3 pour faire passer en force la réforme des retraites.

Suite à la défaite institutionnelle, la mobilisation a repris toute sa force. Le ministère de l’intérieur a recensé, en soirée, 1,08 million de manifestants en France, dont 119 000 à Paris. La CGT a annoncé, de son côté, 3,5 millions de personnes mobilisées, dont 800 000 personnes dans la capitale. Emmanuel Macron a définitivement perdu la bataille de l’image et de l’opinion: l’intersyndicale annonce une nouvelle journée de mobilisation mardi prochain.

 

DT