D’après le rectorat de Lille, les inscrits au tant décrié « Service National Universel » auraient effectué leur premier « séjour de cohésion » dans la région. Dans la Somme, La Providence, établissement privé catholique, est le seul et unique lieu à accueillir des volontaires parmi les « 772 jeunes inscrits en provenance de la Normandie, Bretagne, Pays-de-la-Loire et Provence-Alpes-Côte-d’Azur » selon les responsables.

La région Hauts-de-France devrait accueillir 772 jeunes d’après les organisateurs. Dans la Somme, le seul centre d’accueil des volontaires, est un établissement privé catholique d’Amiens. © SNU/Gouv

Le « Service National Universel » dont l’appellation semble tout aussi suspecte que son principe, attire aujourd’hui encore les foudres et les critiques. Oser associer la « nation » à une quelconque forme « d’universalité » partait déjà mal pour l’exécutif qui souhaitait rendre cet « embrigadement » de la jeunesse, obligatoire.  Mais ce service, vague copie de l’ancien service militaire obligatoire, est une réelle mise au pas et « militarisation de la jeunesse  » selon ses opposants.

Un caractère obligatoire qui est revenu sur le devant de la scène il y a quelques jours. Dimanche, sur France 3 Centre-Val-de-Loire, la secrétaire d’Etat chargée de la jeunesse, Sarah El Haïry, était par ailleurs face au militant des Jeunes écologistes Noé Petit, opposé à ce projet « d’embrigadement et de militarisation de la jeunesse. » Il venait de lui rappeler que le président de la République avait voulu rendre le SNU obligatoire mais avait dû reculer « à cause des contestations sociales. » Sarah El Haïry lui a rétorqué qu’ « à aucun moment le président de la République n’a dit, n’a exprimé l’idée que ce soit obligatoire. »

C’est faux, comme le rappelle Le Monde.

Le SNU, jugé trop coûteux et trop militaire par de nombreux opposants, est toujours en phase d’expérimentation et ne concerne que des jeunes volontaires : ils étaient 14 650 en 2021 et 32 000 en 2022.

Jusqu’à mardi, sur le site du SNU il était précisé que « le séjour de cohésion (phase 1) et la réalisation d’une mission d’intérêt général (phase 2) prévus dans le cadre du SNU ont vocation à devenir obligatoires pour l’ensemble d’une classe d’âge. » Mardi après-midi, la page du site gouvernemental ne mentionnait plus la volonté de rendre le service obligatoire. Une modification que le cabinet de Sarah El Haïry a justifié au Monde par la nécessité de nuancer une formulation qui « prêtait à confusion » rapporte le journal.

Agressions, gênes et confusions au pays du SNU

Pire encore. Mi-avril, Politis révélait des cas de harcèlement sexuel, d’agression et de racisme de la part d’un commandant et d’un lieutenant-colonel au cours de deux « séjours de cohésion » du SNU à l’été 2022.

Autant de faits qui contredisent les principes vantés par l’exécutif pour instaurer son « SNU »: un projet « pour que les jeunes gagnent en confiance, s’émancipent » , pour « créer de la solidarité, de l’engagement et de la cohésion« , et « pour faire vivre les valeurs de la République. »

C’est donc tout naturellement, pour « faire vivre les valeurs de la République » pour « pousser les jeunes à s’engager » que dans le département de la Somme, le seul lieu qui accueille les volontaires du SNU, est un établissement privé catholique.

Et pas des moindres puisqu’il s’agit de l’établissement amiénois, La Providence.

Capture d’écran du site du Rectorat au 05/05/2023 énumérant les différents « centres d’accueil » dans les Hauts-de-France.

A ces dysfonctionnements, s’ajoute un coût exorbitant pour l’Etat qui fait de son projet contesté une priorité, au détriment de missions éducatives essentielles.

Une gabegie dénoncée par les syndicats des professionnels de l’éducation qui y voient également un énième sabotage de leur expertise pédagogique: « Le SNES-FSU s’oppose à toute dénaturation des métiers et restera vigilant sur les droits des personnels. Le SNES-FSU exige la suppression du SNU et l’utilisation du budget alloué au SNU (140 millions d’euros en 2023 soit 2400€ par volontaire) pour mettre en place des projets réellement éducatifs porteurs de sens. »

Le coût de la généralisation du SNU à l’ensemble d’une classe d’âge -volonté initiale d’Emmanuel Macron– est estimé à plus de 2 milliards d’euros par an. Début mars, un rapport du Sénat estimait par ailleurs que « le ralentissement du déploiement du SNU s’explique d’abord par les difficultés matérielles rencontrées lors des expérimentations » et proposait de différer sa généralisation.

Mobilisation contre le SNU à Saint-Quentin, ce samedi

Ce samedi 6 mai à 12h30 devant l’Hôtel de ville de St-Quentin, dans l’Aisne, un rassemblement d’opposants au SNU est prévu: « A 16 ans on est révolté, on ne se tient pas au garde-à-vous ! »