Ce lundi 19 juin, à Amiens, France 3 Picardie organisait une rencontre entre ses équipes et son public. Une trentaine de personnes étaient réunies Quai de l’innovation pour évoquer la représentation de la diversité culturelle, de genres ou d’orientations sexuelles dans le média régional qui s’apprête à voir son temps d’antenne augmenté dès la rentrée prochaine suite à l’abandon des journaux télévisés de la rédaction nationale. L’occasion pour France 3 Picardie de faire son autocritique pour co-construire le média global de demain.

Dès la rentrée prochaine, l’arrêt des JT nationaux va libérer du temps d’antenne pour les rédactions locales de France 3 qui poursuit sa mutualisation de certaines émissions à l’image de la matinale de France bleu Picardie retransmise par France 3 Picardie et mise en image par la société privée Eden Production. Une mutualisation des talents et des coûts bienvenue après la suppression de la contribution à l’audiovisuel public.

Parmi le public, des représentants d’associations bien connues dans l’agglomération amiénoise, l’association LGBTQIA+ Flash Our True Colors, Femmes Solidaires ou bien encore Carmen, venues donner leurs avis sur la représentation des femmes, des diversités culturelles ou d’orientations sexuelles dans le média. « Sur la notion de diversité elle-même, moi je préfère prendre le contre-pied et parler d’égalité, c’est quelque chose que l’on a en nous. Quand on est service public, c’est dans notre ADN  » précise d’emblée Christophe Poullain, directeur régional de France 3 Hauts-de-France. Et de reconnaitre « après c’est simple à dire mais pas toujours simple à mettre en musique. Cela dit c’est aussi une mission, on ne travaille pas sur le ressenti, on a aussi des comptes à rendre à l’ARCOM, le gendarme de l’audiovisuel qui nous interroge régulièrement comme lors des campagnes électorales, avec le respect des temps de parole, on a un cadre et notre manière d’aborder les choses mais on a aussi besoin d’échanger pour peut-être percevoir les sujets d’une autre manière qui est la nôtre, toujours à travers un prisme professionnel. »

Très vite, l’assemblée, composée également de téléspectateurs, d’internautes, de lecteurs du média régional au quotidien, est invitée à se saisir de son téléphone pour répondre anonymement à quelques questions sur la façon dont chacun se sent représenté sur les chaînes du service public. Le débat prend et le public demande rapidement quelques précisions sur les questions. Pour Martine, membre de l’association Femmes Solidaires, difficile de répondre de façon précise: « on ne regarde pas France 2, France 3 ou France 5 pour les mêmes raisons, les attentes sont différentes. »

Les rencontres avec les téléspectateurs sont organisées à la demande des rédactions locales de France 3 et sur des thématiques variées; interactives, elles permettent au public de s’exprimer librement sur les choix et les orientations de la rédaction locale.

Apparaît alors sur l’écran un nuage de mots clefs: « Trop de diversité » / « territoires oubliés » / « Manque de représentation » / « Informations Buzz » / « lutter contre les stéréotypes »…. Chacun s’exprime librement et progressivement la discussion s’oriente vers les programmes de France 3 Picardie, les choix des sujets, leur durée et leur accessibilité.

« On ne devrait pas se contenter de parler des femmes uniquement lors de la journée des droits des femmes ou des LGBT uniquement en juin, lors des prides » lâche t-on dans le public. Une dimension liée à l’actualité et au rythme des médias que la rédaction de France 3 Picardie n’ignore pas. Pour Romane Idres, journaliste France 3 Hauts-de-France, questionner les automatismes journalistiques et diversifier les sujets est une mission importante pour la rédaction: « Concernant le choix des sujets, on essaie toujours de se poser la question, de diversifier les associations à qui on parle et les sources. » Pour Timothée, la rédaction doit se saisir davantage des outils à portée de main. « Il ne faut pas hésiter à venir nous consulter, on peut aider à transmettre des témoignages ou des sujets » plaide l’administrateur de l’association Flash Our True Colors.

« Faire entrer les gens dans l’émission »

« Moi, je n’ai pas de télé chez moi et donc parfois c’est vraiment très difficile de voir ce qu’il y a, le site de France Télévision n’est pas clair » lâche Louis, membre également de l’association LGBTQIA+ amiénoise. Parmi le public de tout âge, la question de la diversité renvoie surtout à celle de l’accessibilité des programmes sur les différents canaux de diffusion. Si pour les plus âgés c’est l’accès au replay qui coince sur leur écran télé, pour les plus jeunes, adeptes des teasers vidéos et autres stories c’est davantage l’accessibilité sur l’Internet qui fait défaut. « Ce sont des questions que l’on se pose et qui sont sur la table » reconnait le rédacteur en chef de France 3 Picardie, Daniel Ielli et co-fondateur de l’associations France TV pour tou-te-s.

Pour Samira, fan inconditionnelle de l’émission dominicale de Zohra Hamdane « Dimanche en politique » où plusieurs invités politiques sont invités à débattre sur un sujet d’actualité, c’est la durée du programme qui fait défaut. « C’est tellement frustrant ! » estime la téléspectatrice qui voudrait voir plus souvent une émission de politique locale. Et d’ajouter: « il ne faut pas rester qu’entre politiques, le problème c’est que les gens sont dépolitisés aujourd’hui, il faut faire entrer les gens dans l’émission pour les intéresser. » La présentatrice et journaliste de France 3 Picardie acquiesce et espère également voir une émission plus dense à la rentrée prochaine. « La région mérite une émission quotidienne de débats de société et autour de la vie quotidienne » admet Zohra Hamdane esquissant un sourire vers les directeurs de la chaîne.

Marie Sicaud, Zohra Hamdane et Romane Idres animaient trois ateliers différents sur la représentation de la diversité dans le média régional suite à l’échange avec le public.

Après plus d’une heure de débat entre questions interactives et propos libres, le public s’est reparti dans trois ateliers animés par trois visages féminins du média; Marie Sicaud, Zohra Hamdane et Romane Idres. Chaque atelier permettait aux participants de partager en petit groupe sur des points plus précis concernant l’égalité des genres, les LGBTQIA+ ou la représentation des diversités sociales et culturelles.

Des rencontres sous le signe de la franchise et de la convivialité qui se sont conclues en début de soirée autour d’un verre, permettant au média régional du service public d’entretenir courageusement ce lien indéfectible avec son audience, dans toute sa diversité.

DT