Alors que France 3 Picardie est en grève depuis le 8 novembre, provoquant l’interruption des programmes, la direction générale de France 3 nous apporte quelques précisions face aux difficultés rencontrées. La direction parisienne esquisse des pistes de sortie de crise, notamment pour améliorer les conditions de travail. Des conditions dégradées d’après les salariés, suite à la nouvelle édition du journal télévisé.

Depuis la semaine dernière les salariés de France 3 Picardie sont en grève contre la nouvelle édition du JT instaurée à la rentrée. Cinq jours sans JT, ni le midi, ni le soir. Sur le plan national, d’après la SNJ-CGT « 240 JT ont été annulés, soit 87% des éditions. »

« La mise en place de la nouvelle édition, Ici, a dans certaines régions été plus compliquée que dans d’autres. Malgré l’annonce de 60 postes supplémentaires sur l’ensemble du réseau, il y a toujours un lapse de temps assez important entre l’annonce et les recrutements effectifs notamment pour trouver les financements » nous rappelle la direction nationale de France 3.

Le réseau France 3 doit faire face à une particularité qui accentuerait cette pénurie de main d’œuvre. Les scriptes de France 3 -majoritairement des femmes-  sont chargées de la cohérence et de la continuité d’un programme. Elles n’ont néanmoins pas la même formation que les scriptes de France 2 où l’organisation diffère. Des logiciels et des pratiques propres à France 3 qui rendent parfois difficiles les recrutements. « On a même été obligé de rappeler des retraitées » nous glisse la direction. Une situation que les salariés connaissent bien : « voilà des années qu’on alerte sur la pénurie, la direction avait même arrêté de former de nouvelles scriptes » précise t-on du côté des syndicats. « Aujourd’hui la direction se rend compte que sans scripte, pas de JT. »

Dans la nouvelle édition du JT, « qui a nécessité un an de préparation » d’après les responsables du réseau, les scriptes mais aussi les techniciens de régie et les journalistes doivent travailler plus rapidement (et plus longtemps) et découvrent parfois les sujets d’information nationale quelques minutes avant. Une situation qui ajoute un stress considérable selon les syndicats. En effet, depuis la fin du JT national de France 3, toutes les informations nationales et internationales sont redistribuées avant chaque JT aux antennes régionales. Une organisation entre les rédactions en région et la rédaction parisienne qui doit être améliorée, reconnait la direction nationale: « Tout le travail de la rédaction de Paris consiste désormais à améliorer le process afin d’alléger le travail des équipes en région. » 

Face à une actualité nationale et internationale chargée ces dernières semaines, l’organisation de la nouvelle édition a suscité du stress et des craintes supplémentaires chez les salariés: « Et c’est normal, on comprend tout à fait qu’un journaliste à l’antenne ne veuille pas se tromper de termes en découvrant le sujet quelques minutes avant » confie la direction de France 3.

D’autres solutions ont été proposées par les syndicats et la direction afin d’alléger momentanément les équipes. Un décrochage jusqu’en janvier sur « France 3 Toutes régions » pour l’information nationale et internationale afin de décharger les antennes régionales avait été proposé. Un décrochage qui n’aurait concerné que certaines régions et à la condition que ce soit la direction générale qui décide lesquelles, « en concertation avec les directions régionales. » Une proposition que « nous avons refusée car ça reviendrait à mettre en concurrence les antennes et surtout les directeurs et directrices régionaux qui risquent de vouloir se faire bien voir par leur hiérarchie et donc de ne pas prendre réellement en compte les souffrances des salariés » nuancent les syndicats de France 3 Picardie.

D’après la direction générale, dans la nouvelle édition, la part de l’information régionale n’a pas changé malgré une augmentation de la durée du programme. « Le nombre de sujets régionaux n’a pas varié, on ne peut pas réduire la place de l’information nationale, les téléspectateurs y sont attachés » nous certifie la direction nationale.  « Avec cette nouvelle édition, on a battu des records d’audience […] d’autant que cette réforme a été plutôt bien accueillie, sauf par le SNJ (Syndicat National des Journalistes) qui y était fermement opposé dès le début » conclut la direction nationale de la chaine publique. Mais chez la CGT et SUD, on reste plutôt dubitatif face à la situation: « la CGT était aussi vent debout contre le projet Tempo » précise t-on du côté du syndicat. Le projet « Tempo » marquait par ailleurs le début de la « régionalisation » du JT sur France 3.

A France 3 Picardie, après plus de cinq jours sans JT, ni midi, ni soir, les salariés attendent un comité social et économique en milieu de semaine. Des solutions momentanées devraient être proposées au SNJ, la CGT, SUD, FO et la CFDT à l’occasion.

La réduction du JT du soir à 30 minutes en incluant une page d’information nationale et internationale réduite à 7 minutes (contre 8,30 environ aujourd’hui) a été proposée par la direction générale, la direction des programmes de France Télévisions serait chargée de combler la tranche à 19h45. La CGT-SNJ y voit une façon d’amoindrir « encore la présence de l’information nationale et internationale sur notre chaîne en refusant que la rédaction nationale puisse fournir à 19h45 une édition d’information nationale conformément à ses compétences et à l’aspiration de ses équipes »  réagissait l’intersyndicale ce mardi 14 novembre, appelant à poursuivre « la lutte, dans la plus grande unité. »

DT