Une nouvelle annexe de la Bibliothèque Nationale de France devrait voir le jour à Amiens à l’horizon 2028. Le tout nouveau Conservatoire National de la Presse réunira dans la capitale picarde les activités de deux autres sites de la BNF qui prévoit leur fermeture. Pour réaliser un tel projet, 96 millions d’euros seront nécessaires dont 40 millions à la charge d’Amiens Métropole, le département de la Somme et la région Hauts-de-France. A la BNF, les syndicats dénoncent « le côté obscur du nouveau centre de conservation » et son financement risqué qui interroge.

La BNF arrive à Amiens, la face cachée d’une bonne nouvelle. © CC 2014

Suite à un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) publié le 25 juin 2020, la BNF avait reçu 72 candidatures de collectivités désireuses d’accueillir le pôle de conservation et le Conservatoire National de la Presse. Amiens Métropole l’a remporté grâce à une proposition d’investissement considérable relevée à plusieurs reprises par les différents décideurs politiques.

Sur les 96 millions d’euros nécessaires pour la construction du nouvel établissement à Amiens, 30 millions d’euros sont financés par l’Etat, 40 millions d’euros par Amiens Métropole et ses partenaires et 26 millions d’euros environ par la BNF.

Pour investir une telle somme la Bibliothéque Nationale de France va devoir vendre 5 de ses bâtiments. Une saignée immobilière qui laisse présager des risques de spéculation selon la CGT BnF qui déplore des investissements couteux:  « L’établissement doit donc trouver une somme considérable afin de contribuer au financement de ce nouveau site.

Pour mémoire, le coût de l’extension du centre de Bussy, initialement envisagée, était estimé à 30 millions d’euros.

Le Fonds de dotation de la BnF créé en 2015 sera sollicité, précise le syndicat. C’est une structure de droit privé qui permet de constituer un capital financier alimenté par des dons, legs, etc. et qui génère des revenus destinés à la recherche, aux acquisitions, à la restauration, à la rénovation des sites patrimoniaux de la bibliothèque. Le fonds est aujourd’hui doté de 2,4 millions d’euros provenant principalement des legs Pigott et Pasteur Vallery-Radot. En plus des dons et legs, la direction souhaite verser au fonds les produits de cession de ces biens immobiliers pour financer le futur centre de conservation.

Sur la liste des ventes à venir : le bâtiment de la rue Colbert, Louvois, le château de Sablé. » A cela s’ajoutent l’antenne dans la Sarthe rapatriée à Amiens et celle de l’actuel conservatoire de la presse de Bussy-Saint-Georges: « Le devenir de Bussy est dans l’expectative et dépend des négociations » conclut la CGT BnF. Selon le plan de financement du futur Conservatoire National de la Presse à Amiens, la vente des biens immobiliers de la BNF est estimée à 20 millions d’euros. Une situation tendue selon le Sénat qui précise que la BNF est « sur le fil du rasoir budgétaire » .

Le Sénat inquiet pour le budget de la BNF

En effet, pour le rapporteur de la Commission Culture, Julien Bargeton « L’équation budgétaire de la BNF dans les prochaines années est donc particulièrement complexe. » Ses ressources propres sont encore trop fragiles selon le sénateur LREM de Paris, qui rappelle dans l‘avis sur le projet de loi de finances pour l’année 2022, qu’elles avoisinent les 10 millions d’euros par an et ont baissé de 2,6 millions € en 2021.  « Environ les deux-tiers des dépenses de fonctionnement sont contraintes, ce qui laisse peu de marges de manœuvres pour développer de nouveaux projets, voire assurer l’ouverture des infrastructures existantes.

Si la BnF a été relativement épargnée par la crise pandémique, elle n’a pas non plus bénéficié de compensation, alors que ses ressources propres ont baissé de 2,6 millions d’euros en 2021. Lesdites ressources propres s’avèrent de surcroît particulièrement volatiles, avec une moyenne de 10 millions d’euros ces dernières années et de faibles possibilités de développement. »

Une situation relevée également par les syndicats de la BNF qui y voient quant à eux davantage l’expression politique visant à réduire les coûts de fonctionnement de l’établissement tout en osant des investissements qui interrogent les salarié-es  sur leur avenir.