Alors qu’Emmanuel Macron et Marine Le Pen se sont affrontés ce mercredi lors du traditionnel débat d’entre-deux-tours. Les deux candidat-es à l’élection présidentielle proposent un programme libéral pour l’un et « social-populiste » pour l’autre,  hermétiques aux problématiques environnementales et sociales. Lors de ce débat, la candidate du Rassemblement National est apparue comme une adversaire ordinaire à part entière face à un président sortant offensif malgré le manque de préparation de la candidate.

Un échange courtois, technique et trop souvent dépolitisé qui a réuni moins 15.7 millions de téléspectateur-trices, la pire audience de l’histoire selon Médiamétrie. 

Emmanuel Macron (LaREM) et Marine Le Pen (RN) lors du débat d’entre-deux-tours ce mercredi 20 avril.

Durant près de 3 heures de débat, comme le soulève Médiapart, le mot « extrême-droite » n’aura pas été prononcé, ni même le racisme, la xénophobie et la haine de l’autre qui caractérisent l’ex Front National. Le président sortant rappellera tout juste qu’il combat les idées du parti lepéniste tout en glissant un « je vous respecte » en toute fin d’émission. Saupoudré d’échanges cordiaux et presque agréables, le débat entre les deux candidats participe largement à la banalisation des idées extrémistes au beau milieu d’un discours creux et inaudible.

Le président sortant aura donc poursuivi sa stratégie tout au long de sa campagne, il en est par ailleurs persuadé; la « diabolisation » de l’extrême-droite n’est plus efficace et depuis 2002, le « barrage républicain » a pris du plomb dans l’aile. Transformant le deuxième tour de l’élection présidentielle en un référendum pour approuver ou désapprouver sa politique, Emmanuel Macron participe à rendre le projet néofasciste de Marine Le Pen comme une alternative possible.

Marine Le Pen « trop molle » selon Gérald Darmanin

C’est aussi en respectant cette même stratégie qu’Emmanuel Macron a laissé sur le devant de la scène Gérald Darmanin tout au long de sa campagne. Les électeurs se souviennent du débat entre le ministre de l’Intérieur et Marine Le Pen le 11 février 2021, une étape importante dans la banalisation d’idées xénophobes et racistes. Le ministre avait en effet jugé la candidate frontiste « trop molle ».

Paraissant très proches sur le plan des idées pendant leur débat, ces confusions n’ont pas permis à LaREM d’apparaître comme un réel bouclier républicain face à la montée de l’extrême droite. A cet instant, Marine Le Pen cessait d’être une ennemie de la République et apparaissait comme une alternative nationaliste possible. Initiative laissant libre place à l’arrivée des idées néofascistes dans le débat public alors que nous traversons une crise sanitaire qui a révélé des manquements graves de la part des différents gouvernements qui se sont succédé. Le trouble est ainsi jeté dans la nation.

Marine Le Pen: le plus gros échec d’Emmanuel Macron

Quoique son image adoucie, la candidate du Rassemblement National est bel et bien l’ennemie des libertés –de la presse aux minorités- et de l’égalité. Dans toute l’Europe, l’extrême droite a montré son vrai visage. En Hongrie, une loi anti-promotion de l’homosexualité a été promulguée par le gouvernement extrémiste; elle était présentée en lien avec la lutte contre la pédocriminalité. Des lois qui suivent par ailleurs la législation et le comportement de la Russie envers les LGBTQIA+. Chaque loi défendue par l’extrême-droite en Europe a été une agression pour l’humanité, envers les juifs, les musulmans, les LGBTQIA+ ou les étrangers. A plusieurs reprises, Marine Le Pen s’est même dite prête à « repousser dans les eaux internationales les migrants qui voudraient entrer en Europe » et même à supprimer le droit du sol et mettre fin au regroupement familial, plongeant dans le chaos tout un pays.

Arrivée derrière Emmanuel Macron au premier tour, la candidate a réuni plus de 8,1 millions de suffrages, un record pour l’extrême droite en France. Loin du choc de la qualification de Jean-Marie Le Pen en 2002, cet événement a, cette fois, été accueilli dans une relative banalité mais c’est aussi un échec pour le président sortant.

Pourtant ce dimanche, les 48.8 millions électeur-trices devront faire leur choix. Si les mélenchonistes ne sont pas prononcés clairement en faveur d’Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon a bien rappelé le péril: « pas une seule voix pour Le Pen » avait-il martelé.

Le troisième homme de l’élection a demandé en début de semaine aux français-es de l’élire Premier ministre, demande à laquelle Emmanuel Macron a répondu ce vendredi 22 avril sur France Inter. Pour le président-candidat, le cap est clair, il ne faut pas confondre les agendas: « Je me bats d’abord pour avoir la confiance de nos compatriotes dimanche. Ensuite, il y aura des législatives, et à la lumière de ces législatives, il y aura un Premier ministre à choisir…. ou une Première ministre.  »