La municipalité d’Amiens a annoncé allouer 280 000 euros en 2022 pour l’équipement de la Police municipale et l’installation de caméras de surveillance. L’adjoint à la sécurité a ainsi annoncé le 3 mars l’achat de trois LBD 40 supplémentaires, l’opposition dénonce un dévoiement des fonctions de la Police municipale qui a fermé certaines de ses antennes de quartier dans l’agglomération.
Lors du dernier conseil municipal d’Amiens, ce 3 mars 2022, Hubert de Jenlis (LREM), adjoint au maire délégué à la Sécurité, a présenté un investissement annuel considérable à hauteur de 280 000€ pour la « Modernisation des systèmes de prévention ». D’ici 2026, c’est près d’1,5 million d’euros qui sera consacré à la prévention. La municipalité (UDI/LREM/LR) prévoit l’achat de caméras de surveillance supplémentaires et des armements permettant « de détendre certains climats tendus » pour la Police municipale.
Des LBD supplémentaires pour une police de proximité ?
La municipalité veut plus de caméras et des équipements plus dissuasifs pour la Police municipale notamment en remplaçant des Lanceurs de Balles de Défense qui seraient usagés. L’adjoint admet pourtant qu’ils n’ont jamais servi. L’opposition dénonce des investissements hasardeux pour des outils de prévention des délits peu efficaces et controversés. Pour François Décavé, élu d’opposition Amiens c’est l’tien, le LBD est « une arme dont l’usage dans le cadre du maintien de l’ordre ces derniers mois a montré la difficulté et un côté fort contesté par un certain nombre d’intervenants et d’experts sur le sujet. »
« Il s’agit ici du renouvellement de 3 lanceurs de balles de défense, les tristement connus LBD, pour un montant de 10 000 euros. Est-ce bien le rôle d’une police municipale d’avoir des armes de ce type? demande de son côté Tarek Bais (PS). Pour avoir une police municipale qui soit une véritable police de « proximité », proche des habitants, ces armes sont inutiles, » ajoute l’élu d’opposition socialiste. En effet, elles doivent être utilisées dans un cadre extrêmement strict pour ne pas blesser gravement. Sur ce point, les manifestations de gilets jaunes auront montré les dégâts causés par ces armes, avec des personnes éborgnées. Même si cette arme n’était réservée que pour les « interventions », comment les utiliser dans les moments où il faut être au contact, pour résoudre des problèmes, alors qu’il faut des distances minimales de tir ? »
Dissuader ou mutiler pour l’exemple ?
« Sachez que c’est un armement non létal, c’est ce qu’on appelle un armement intermédiaire. C’est de la dissuasion et fort heureusement il n’a jamais été utilisé » répond Hubert de Jenlis.
Une information que nuance Mélanie N’goye Gaham, manifestante parmi les gilets jaunes et membre du collectif des mutilé.e.s pour l’exemple: « Les LBD n’ont pas mutilé sur Amiens mais ils ont bel et bien blessé. En décembre 2018, trois gilets jaunes amiénois ont du se rendre aux urgences. En octobre 2019, une camarade a également pris un LBD. »
« Je ne comprends pas comment une police qui n’a pas le droit de fouiller ton sac a le droit de posséder ce genre d’arme dite non-létale mais qui tue psychologiquement à petit feu les personnes mutilées. »
Caméras de surveillance aux points sensibles, une solution qui a fait ses preuves selon la majorité
Outre l’achat d’équipements spécifiques pour la police municipale, la majorité prévoit également des investissements importants dans l’installation de nouvelles caméras notamment aux abord de la maison d’arrêt au nord de l’agglomération mais aussi, dans le quartier Pierre Rollin ou bien encore rue Germaine Dulac ou Rimbaud.
Alain Gest (LR) a rappelé, non sans ironie, que la précédente majorité de gauche était restée bloquée à 49 caméras, presque fier aujourd’hui que la municipalité compte plus de 139 caméras; une première étape selon la majorité. « Si vous voulez des résultats tangibles en matière de prévention de la délinquance (par rapport à) l’installation de caméras vous n’avez qu’a vous renseigner auprès de la direction de l‘Amsom qui a fait un effort considérable d’installation de caméras et qui a abouti à une chose c’est que certains bâtiments, je pense à la résidence Balzac, qui n’étaient plus habités depuis 3 ans[…] accueillent de nouveaux locataires« . Selon le président (LR) d’Amiens Métropole et 3e adjoint délégué aux relations extérieures d’Amiens, l’installation de caméras aurait permis de rendre la résidence Balzac (lot d’immeubles connus du Pigeonnier pour ses trafics) à nouveau louable.
« Je sais très bien que (l’installation de caméras à la maison d’arrêt) ça ne va pas ralentir le parachutage dans le voisinage qui dure depuis des décennies, rappelle l’élue d’opposition ACLT Emilie Thérouin, ancienne adjointe à la sécurité lors du mandat du maire PS Gilles Demailly (2008-2014) nous, notre problème, c’est sur la prévention de la délinquance sur la voie publique« , s’appuyant sur des rapports d’experts, les élu-es d’opposition d’Amiens c’est l’tien ont rappelé leur opposition à ce système de prévention, qui comme en témoignent les investissements prévus, sont couteux et peu efficaces.
D’après certaines recherches relayées par Le Monde en mai 2018, la vidéo-surveillance serait efficace dans moins de 3% des infractions.