Martine Tékaya était l’invitée de l’émission Dialogue Citoyen diffusée sur Public Sénat ce jeudi 25 mars. Parmi une dizaine de personnes interrogées au sujet des droits des femmes et de la trop lente égalité entre les genres, la militante associative amiénoise est revenue sur la condition des femmes dans l’espace public. La vice-présidente du comité local Femmes Solidaires, prend l’exemple du marché du Colvert, à Amiens Nord, où la majeure partie de la population dans la rue reste masculine.

 

Alors que la place du Colvert, célèbre à Amiens Nord pour son marché, connait d’importants travaux depuis plusieurs mois, le clinquant du centre commercial semble attirer les curiosités davantage que la place des femmes dans le quartier. Pourtant l’urbanisme et le manque de références historiques ou culturelles féminines participent à l’invisibilisation des femmes comme le soulève Jérémy Bacchi, sénateur communiste des Bouches-du-Rhône, présent sur le plateau.

Mais cette situation, Martine Tekaya la connait bien. Dans ce quartier populaire d’Amiens, « quand il fait beau, il n’y a pas un endroit où elles peuvent se poser sur un banc, discuter entre elles, rester dehors. On s’est promené dans un endroit où tout de suite on a été accosté par une bande de quatre cinq jeunes hommes qui sont venus nous demander: « mais qu’est-ce que vous faites là? Attention vous faites des photos, mais quelles photos ? » avec une certaine agressivité. »

Des femmes avant d’être des mères de famille

Durant son intervention sur Public Sénat, la militante associative détaille le quotidien de nombreuses femmes, à Amiens Nord, cantonnées alors au rôle de mère et confinées à longueur d’année dans le quartier. « Elles vont conduire les enfants à l’école, font le ménage, s’occupent de la maison, vont chercher les enfants le midi, les reconduisent à l’école l’après-midi et vont éventuellement dans une association à proximité  de chez elles où essentiellement on va leur proposer de la couture, du tricot, de la cuisine donc elles restent confinées dans leur quartier et confinées dans leurs activités »

« Ces femmes ont envie d’être autre chose, de ne plus être uniquement des mères de famille mais aussi des femmes. »

Une vie en vase clos que Martine Tekaya dénonce volontiers. La militante y voit surtout le signe d’un patriarcat encore omniprésent en France. Le Colvert n’échappe à la règle malgré la diversité des communautés du quartier.

Malgré la diversité, le patriarcat en commun

« Dans ces quartiers il y a beaucoup de femmes qui ont des origines étrangères différentes, des femmes qui viennent du Maghreb, d’Afrique, des pays de l’est où il y a toujours cette culture patriarcale que l’on connait nous aussi en France où beaucoup de femmes ont été élevées dans cette culture[…] Dans ce quartier, il y a un marché très connu, on peut considérer qu’il y a 70% d’hommes dans ce marché contre 30% de femmes« , constate l’amiénoise.

Ces héritages, souvent inconscients, de la part des femmes et des hommes qui calquent le modèle des référents parentaux, témoignent également du manque, sur le plan éducatif, d’un vrai travail sur l’égalité entre les genres. L’école a souvent été très frileuse à traiter ce genre de questions pourtant fondamentales. « C’est très jeune qu’il faut intervenir dans les écoles, nous, nous intervenons dès la maternelle et l’école primaire » conclut Martine Tekaya rappelant au passage le travail et le budget souvent restreint de ces associations pour l’émancipation des femmes dans les quartiers populaires.

 

 

Crédits photo de Une : Capture d’écran d’un reportage de FR3 Picardie